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ANNALES
DE
CHIMIE ET DE PHYSIQUE,
PAR
MM. ARAGO, CHEVREUL, DUMAS, PELOUZE, BOUSSINGAULT, REGNAULT.
AVEC
UNE REVUE DES TRAVAUX DE CHIMIE ET DE PHYSIQUE
Publiés à l'étranger; P a r MM. WÜRTZ e t VERDET.
TROISIÈME SÉRIE.-TOME XXXVII.
PARIS,
VICTOR MASSON, LIBRAIRE,
PLAGE DE L écOIiK DE MEDECINE, N° 1 7 . IMPRIMERIE DE BACHELIER, ACE DU JARDINET, N ° 1 3 .
1853.
( 1 8o )
le sature de vapeur deau ou quon len prive absolument, en le faisant passer dans des tubes humides ou remplis de corps dessic­ catifs, cela tient au frottement qu'il éprouve contre les surfaces au contact desquelles il est exposé.
Il a conclu de ses expériences que ce nest point en concentrant par évaporation les solutions salines sursaturées, que lair en dé­ termine la cristallisation, ainsi que lont prétendu M. Goskinski et M. Sel mi.
M. H. Lœwel ajoute de nouveaux faits à lappui de cette con­ clusion.
i°. Si, dans un premier tube, on sature lair de vapeur deau, et que dans un second tube, on len dépouille absolument, lair est devenu adynamiqtie;
2°. Il nest point devenu adynamique en séchauffant par la chaleur développée dans sa dessiccation par la potasse caustique;
3°. Lair devient adynamique en passant dans un tube de o m,4 à o m,5 de longueur sur o m,o i 5 à o m,o i 8 de diamètre, rempli de coton : expérience bien propre à démontrer que cest par le frot­ tement que lair perd sa propriété dynamique ;
4°. Que cet air arrive dans la solution, raréfié ou plus con­ densé quil ne lest dans latmosphère, ou enfin également con­ densé ; la cristallisation ne sopérera pas dans ces trois cas.
MÉMOIRE SUR LA VITESSE DE LA LUMIÈRE;
P a r M. ARAGO ( i ).
La détermination de la vitesse prodigieuse avec laquelle se meut la lumière dans l espace est, sans contredit, un des plus beaux résultats de l astronomie moderne. Les anciens
(i) A peine retenu dAfrique, en 1809, je me livrai fort jeune encore, j avais vingt-trois ans, à diverses expériences relatives à l'influence do la vi­ tesse de la lumière sur la réfraction. Le résultat de mon travail fut commu­ niqué à la première Classe de l institut, le 10 décembre 1810. Ce résultat, quoique très-différent de celui auquel je me'tais attendu, excita quelque in­ térêt. M. Laplace me fit lhonneür de le mentionner dans une des éditions de l'Exposition du Système du monde. Notre illustre doyen, M. Biot, voulut bien aussi le citer dans la seconde édition de ton Traité élémentaire dAstro­ nomie physique. Je crus dès lors que je pouvais me dispenser de publier mon Mémoire.
Depuis cette époque, ce travail étant devenu le point de départ des re­ cherches expérimentales et théoriques qui ont été faites ou projetées dans di­ vers pays, sur létat dans lequel se trouve léther dans4les corps solides, j ai
( 181 ) croyaient celte vitesse infinie ; et leur manière de voir n était pas, à cet égard, comme sur tant dautres questions de physique, une simple opinion dénuée de preuves; car Aristote, en la rapportant, cite à son appui la transmission instantanée de la lumière du jour. Cette opinion fut en­ suite combattue par A lhazen, dans son Traité doptique, mais seulement par des raisonnements métaphysiques aux­ quels Porta, son commentateur, qui admettait ce quil ap­ pelle l immatérialité de la lum ière, opposa aussi de trèsmauvais arguments. Galilée paraît être le premier, parmi les modernes, qui ait cherché à déterminer cette vitesse par expérience. Dans le premier des dialogues delle Scienze N uove, il fait énoncer par Salviati, un des trois interlocu­ teurs, les épreuves très-ingénieuses quil avait employées, et quil croyait propres à résoudre la question. Deux obser­ vateurs , avec deux lum ières, avaient été placés à près dun m ille de distance: l un deu x, à un instant quelconque, éteignait sa lum ière; le second couvrait la sienne aussitôt quil ne voyait plus lautre ; m ais, comme le premier obser­ vateur voyait disparaître la seconde lumière au même mo­ ment où il cachait la sienne, Galilée en conclut que la lu­ mière se transmet dans un instant indivisible à une distance double de celle qui séparait les deux observateurs. Des ex­ périences analogues que firent les Membres de l Àcadémie d el Cimento, mais pour des distances trois fois plus consi­ dérables, conduisirent à un résultat identique.
Ces épreuves semblent, au premier aspect, bien mes­ quines, lorsquon songe à la grandeur de leur objet; mais on les juge avec moins de sévérité, quand on se rappelle
été invité, à diverses reprises, à le publier ; mais le Mémoire sétant égaré, jo ne pouvais pas déférer à ce vœu. 11 y a peu do jours quen rangeant mes papiers par ordre de matière, on y a retrouvé le Mémoire original de 1810. Je me suis rappelé alors le désir exprimé par les physiciens, et j ai demandé a rAcadémie la permission de faire paraître mon Mémoire dans le Com pte rendu, quoiqu'il date de quarante-deux ans. Je le reproduis ici, malgré toutes sos imperfections, sans y changer un seul mot.
(
)
quà peu près à la même époque, des hommes, tels que
lord Bacon, dont le mérite <îst si généralement apprécié,
croyaient que la vitesse de la lumière pouvait, comme celle
du son , être sensiblement altérée par la force et la direction
du vent.
Descartes, dont le système sur la lumière a tant dana­
logie avec celui quon désigne par le nom de système des
ondulationsycroyait que la lumière se transmet instantané­
ment à toute distancé; il appuie dailleurs cette opinion
dune preuve tirée de l observation des éclipses de Lune. Il
faut convenir que son raisonnement, très-ingénieux,
prouve, sinon que la vitesse de la lumière est infinie, du
moins quelle est plus considérable que toutes celles quon
pouvait se flatter de déterminer par des expériences directes
faites sur la Terre à la manière de Galilée.
Les fréquentes éclipses du premier satellite de Jupiter,
dont la découverte suivit de près celle des lunettes, four­
nirent à Roëmer la première démonstration quon ait eue
du mouvement successif de la lumière. La connaissance en­
core très-imparfaite des mouvements des autres satellites,
la difficulté dobserver exactement leurs éclipses, et quelques
inégalités inconnues q u i, en se combinant avec celle qui
dépendait du mouvement de la lum ière, en masquaient les
effets, les rendaient moins saillants, et empêchaient, par
conséquent, de la reconnaître, firent quelque temps rejeter
la découverte de Roëm er; elle ne fut même généralement
admise que lorsque Bradley eut montré que ce mouvement
annuel, auquel toutes les étoiles sont assujetties, et quon
nomme l aberration, dépend de l effet combiné du mouve­
ment de la lumière avec celui de l observateur. La vitesse
quon avait déduite de ce dernier phénomène différait un
peu de celle quon obtenait par les éclipses du premier sa­
tellite; mais la perfection à laquelle on a porté les Tables,
par les travaux de M. Laplace, a permis de revenir sur ces
premiers calculs : la constante de l aberration que M. De-
( i 83 ) lambre a trouvée par la discussion dun très-grand nombre déclipses de satellites, est absolument la même que celle que Bradley avait déduite de ses observations.
La première conséquence quon puisse tirer de cet accord remarquable, est que la lumière se meut uniformément, ou du moins sans aucune variation sensible y dans tout l es­ pace compris par l orbe de la Terre ; l'excentricité de l orbe de Jupiter permet détendre ce résultat à l immense inter­ valle quil embrasse. Il est dailleurs assez naturel de sup­ poser que les étoiles de diverses grandeurs sont inégalement éloignées; et, comme leurs aberrations absolues, déduites des observations directes, sont sensiblement les mêmes, Bradley en avait conclu que le mouvement de la lumière est uniforme à toutes les distances, et. que l aberration de tous les corps célestes peut se calculer avec la même constante. Quelques astronomes n avaient cependant pas adopté ce ré­ sultat; ils soupçonnaient que les étoiles de diverses gran­ deurs peuvent émettre les rayons avec différentes vitesses, et il faut convenir que cette idée, surtout dans le système de lémission , était à la fois"naturelle et probable. L obser­ vation directe de l aberration était peu propre à résoudre cette question dune manière décisive, puisquune diffé­ rence dans la vitesse de la lumière, égale à ^ de la vitesse totale, ne doit produire dans l'aberration quune différence de i f\ précision quon ne peut se flatter de surpasser, même à l aide des meilleurs instruments; mais, si lon se rappelle que la déviation quéprouvent les rayons lum ineux, en pénétrant obliquement dans les corps diaphanes, est une fonction déterminée de leur vitesse prim itive, on verra que l observation de la déviation totale, à laquelle ils. sont assu­ jettis en traversant un prism e, fournit une mesure natu­ relle de leurs vitesses. Cette méthode est dailleurs trèspropre à rendre sensibles de légères inégalités ; car, comme il est facile de le démontrer,.une différence de vitesses égale
à y-0 produit dans les déviations une différence de 2', en
supposant même quon nemploie quun prisme dont l angle
( 184 )
ne surpasse pas 45'. T elle est aussi la marche que j avais suivie dans les expériences dont j eus lhonneur de com­ muniquer les résultats à la Classe, il y a maintenant plus de quatre ans; les rayons lumineux provenant de diverses étoiles, du Soleil, de la Lune, des planètes et des lumières terrestres, avaient subi la même déviation ; les plus grandes discordances sétaient élevées à 5", et ce nom bre, qui est la somme des erreurs dobservation et de déclinaison, ne correspond dailleurs quà de changement dans la vi­ tesse et à de seconde sur l aberration; j avais conclu de ces résultats que la lumière se meut avec la même vitesse , quels que soient les corps dont elle émane, ou que du moins, sil existe quelques différences, elles ne peuvent, en aucune manière, altérer lexactitude des observations astrono­ miques.
Depuis la lecture de mon M émoire, M. Calendreli a publié, dans ses Opuscules astronomiques, imprimés à Rom e, quelques expériences faites par cette méthode, et qui l ont conduit aux mêmes conclusions, excepté dans ce qui a rapport à la lumière solaire, à laquelle il assigne une réfraction particulière; mais je me suis assuré que ce der­ nier résultat, dont on ne saurait admettre lexactitude, tient à ce q u e , dans lobservation des étoiles, lastronome romain visait au centre de la lumière jaune, tandis que pour le Soleil, dont il était forcé dobserver le bord, il pointait, au contraire, à une des couleurs extrêmes du spectre : il me suffirait dailleurs, pour justifier, indépen­ damment de ces considérations, le résultat auquel j étais parvenu, de remarquer que M. Calendreli trouve, ainsi que m o i, que les taches de la L u n e , que nous napercevons que par la lumière du Soleil réfléchie, sont précisément déviées de la même quantité que les étoiles.
On voit, au reste, que la certitude des conclusions quon tire à l égard de la vitesse de la lum ière, des observations faites à laide des prismes, repose sur celle de la supposition quune inégalité de vitesse produit une inégalité de dévia-
( 185 ) tion, ce qui résulte immédiatement de l explication que Newton donne de la réfraction; les expériences que j ai citées, mavaient fait entrevoir la possibilité de démontrer ce principe, mais les travaux relatifs à la méridienne me firent abandonner cette recherche, que j ai reprise depuis mon retour, et dont je vais aujourdhui communiquer les résultats à la Classe.
Mes expériences étaient à peu près achevées, lorsque la lecture dun des beaux Mémoires que le D r Young a inséré dans les Transactions philosophiques, mapprit que M . Robisson, professeur de physique à Edim burgh, avait considéré théoriquement cette question de la vitesse de la lum ière; j a i , depuis, trouvé, dans divers ouvrages, quelle avait été examinée sous différents points de vue par Boscow ich , M ichell, W ilson et Blair.
A vant de parler de mes observations, je crois devoir in­ diquer les projets quavaient publiés à cet égard les physi­ ciens que je viens de citer.
L idée de chercher à sassurer, par des expériences di­ rectes, de l accroissement de vitesse quacquièrent les rayons lumineux en passant dun milieu rare dans un m ilieu dense, a dû naturellement se présenter à un très-grand nombre de personnes; mais Boscowich est, à ma connaissance, le premier qui ait publié à cet égard 1111 projet dexpériences raisonné. Ce physicien avait cru quen observant les étoiles à travers une lunette remplie deau , on devait trouver, à cause de l augmentation de vitesse quacquièrent les rayons en pénétrant dans ce liquide, une aberration différente de celle quon observe lorsque lespace qui sépare l objectif de l oculaire est rempli dair. Cette même circonstance devait apporter des changements très-sensibles dans la position de6 objets terrestres, qui auraient été ainsi assujettis à une aberration diurne. Il trouvait, par exemple, quune mire située au sud, au solstice d hiver, aurait décrit, en vingtquatre heures, un cercle dun rayon = 5 ", et dont le centre correspondrait à la position moyenne de l objet;
( >86 )
mais le raisonnement de Boscowich est défectueux, en ce quil a oublié de tenir compte de la réfraction, e t, par conséquent, du changement de direction que doivent éprouver les rayons en pénétrant obliquement du verre dans le liquide. Aussi M. W ilson, professeur dastronomie à G lasgow , qui a p ub lié, dans les Transactions philoso­ phiques pour l année 1782, un Mémoire où il propose éga­ lement la lunette remplie deau, comme un moyen de sas­ surer de la théorie new tonienne, arrive-t-il à des conclu­ sions totalement opposées à celles de Boscowich; car il a prouvé que l aberration dans une semblable lunette ne sera égale à celle quon trouve avec un instrument ordinaire, que dans le cas où les vitesses des rayons dans les milieux rares et diaphanes sont entre elles dans le rapport assigné par Newton. On peut dailleurs remarquer que la nécessité dappliquer de forts grossissements aux instruments qui sont destinés à découvrir de petites quantités, rendait la lunette de Boscowich inutile, puisque la lumière dune étoile serait, sinon totalement éteinte, du moins considé­ rablement affaiblie, lorsquelle aurait traversé une épais­ seur de liquide de 3 ou 4 pieds.
La difficulté que présente, sous le rapport qui nous oc­ cupe, la vérification de la théorie new tonienne, résulte de ce principe qui en est une conséquence, savoir : que la vi­ tesse de la lum ière, dans un milieu diaphane quelconque, doit être la m êm e, quels que soient la nature et le nombre de milieux quelle a précédemment traversés. On peut ce­ pendant remarquer q u e , lorsque les corps réfringents sont en mouvement, la réfraction quéprouve un rayon 11e doit plus se calculer avec sa vitesse absolue, mais bien avec cette même vitesse, augmentée ou diminuée de celle du corps, cest-à-dire avec la vitesse relative du rayon; les mouve­ ments que nous pouvons imprimer aux corps sur la T erre, étant beaucoup trop petits pour influer sensiblement sur la réfraction de la lum ière, il faut chercher dans les mouve­ ments beaucoup plus rapides des planètes, des circonstances
( *87 ) plus propres à rendre sensibles ces inégalités de réfraction. W ilson, que nous avons déjà cité, avait proposé demployer ce mode d expériences à la recherche du mouvement de translation du sÿstème solaire. Le Dr Blair, à qui lon doit un travail très-intéressant sur la force dispersive des li­ quides, croyait que lobservation devait rendre sensible l inégalité de vitesse avec laquelle sont réfléchis les rayons lum ineux qui arrivent à nous des deux bords de Jupiter, à cause du mouvement de rotation de la planète sur ellemême; et M. Robisson, dans un Mémoire particulier, où il examine en détail cette question de la vitesse de la lu­ m ière, indique également les observations des deux bords de l anneau de Saturne.
Tels étaient les moyens que ces savants distingués avaient proposés pour résoudre un problème qui intéresse à la fois les progrès de la physique et de l astronomie ; il résulte en outre du précis historique que nous venons de donner, quils sétaient plutôt attachés à tracer la route quil fallait suivre pour arriver à un résultat décisif, quà entreprendre des observations dont ils prévoyaient sans doute la grande difficulté. Jai cru quil serait important demployer les moyens quoffre létat actuel de nos connaissances et la grande précision de nos instruments, à l examen dune question dont le résultat semblait devoir offrir quelques données sur la véritable nature de la lumière.
Je me suis attaché, dans mes expériences, à rendre sen­ sibles les différences qui doivent résulter du mouvement de translation de la T e rre , parce que celui de notre système pouvait, en se combinant avec ce premier, donner nais­ sance à dassez grandes inégalités. Il est dailleurs naturel de supposer que, de même quil y a dans le ciel des étoiles de divers éclats, il y en a aussi de diverses grandeurs, et cette circonstance , comme l a , je crois, montré le premier M. M ichell, doit occasionner des différences de vitesse trèssensibles dans les rayons qui émanent de ces divers corps ;
( *88 ) Ce genre dexpériences me permettait, en outre, dobserver avec une lunette à court foyer, tandis quil serait indispen­ sable demployer un fort grossissement pour reconnaître les inégalités des diamètres planétaires. Cette méthode exi­ gerait de plus que les prismes fussent très-parfaits , puisque les défauts dachromatisme sont en raison directe du gros­ sissement. Quelques essais que j en ai déjà faits, à l aide de l excellent micromètre prismatique de M. Rochon, mont donné cependant l espérance de réussir; je v a is, en attendant, communiquer à la Classe les résultats de la pre­ mière méthode, q u i, dailleurs, sous tous les rapports, me paraît préférable.
Lorsquon regarde un objet à travers un prisme, les iné­ galités de déviation auxquelles peuvent donner naissance des changements dans la vitesse des rayons lum ineux, doivent être dautant plus considérables que l angle du prisme sera lui-même plus grand; m ais, lorsquon se sert de prismes simples ou formés dune seule substance, il est à cet égard une limite quon ne peut dépasser, car, pour peu que l angle du prisme surpasse 4 ou 5 degrés, les bords du spectre sont diffus ; et comme Je passage dune couleur prismatique à la voisine se fait par une dégradation insen­ sible, on ne peut avoir la certitude de pointer, à chaque observation, à des parties des spectres correspondantes ; les prismes achromatiques dont on peut augmenter l angle à volonté, remplissaient beaucoup mieux lobjet que j avais en vue.
Celui qui a servi à mes premières expériences était formé d un prisme de crown-glass et dun prisme de flint adossés; la différence de leurs angles, ou l angle du prisme total, était à peu près égale à 24 degrés.
Afin de diminuer, autant que possible, les réflexions partielles quéprouve toujours la lumière à la surface de sé­ paration des milieux dont les densités sont très-différentes, javais fait coller mes deux prismes avec le mastic dont les
( l89 ) opticiens font usage pour atténuer les défauts de poli des surfaces intérieures des objectifs. Le prisme total était ar­ rêté , dune manière inébranlable, dans une boite dont les tourillons latéraux pouvaient tourner dans des collets, ce qui permettait de donner à la face extérieure l inclinaison qui rendait l image la plus nette. Afin dêtre sûr dobserver dans le plan de l angle réfringent, on sétait également mé­ nagé un mouvement latéral, par un mécanisme qui serait trop long à décrire *, il me suffira de dire que l appareil total pouvait se fixer, à l aide de fortes vis, au couvercle exté­ rieur de la lunette du mural.
Les choses étant ainsi disposées, j ai mesuré dans la même nuit, et à différente époques, les distances au zénith dun grand nombre détoiles ; ces distances, comparées à celles quon aurait observées à travers l air, donnent la quantité de la déviation que le prisme fait éprouver aux rayons lumi­ neux ; cest ainsi quont été formés les tableaux suivants :
Le 1 9 mars 1 8 1 0 (mural). Le 2 7 mars 1 8 1 0 (mural).
NOMS DES ÉTOILES.
DÉVIATIONS.
NOMS DES ÉTOILES.
DÉVIATIONS.
R igel......................................... a cPOrion........................... Castor......................... ... Procyon .................... Pollux.......................
R é g u lu s .................... Epi vierge................ a Couronne.............. a Serpent................. Antarès..................... Ç Ophiuchus............
io .°4,?' 4/>' •rb 25.5 24.6
2 4 ,9
*9 >3 32.6 25.2 ai ,4 22,8 22.3 22,5 2 '|,0
° / // a O rion ............................. 10.4 -33,28
P r o c y o n .............................. Pollux......................... a Hydre............................ /3 L io n ................................ Epi vierge...................... A rct u r u s ........................... a Couronne................... Antarès.............................. £ Ophiuchus................ y V ierg e........................... <y V ierge.......................... s V ie r g e .......................... <y L io n ................................
3 7 .9 3
32.31 32,78 28.32 3o , 2 I 26,29 28, o5 3i ,39 28,19
2 9 ,6 4
27,80
*7,34 3i ,42 34,02
( i£>° ) J'ai ensuite collé ensemble deux prismes achromatiques, semblables à celui qui avait servi à mes premières expé­ riences; mais, afin de me rendre indépendant, dans ces nouveaux essais, de la connaissance de la déclinaison des étoiles, de celle de lerreur de collimation qui peut varier dans nos instruments, avec la hauteur de la lunette et de la réfraction, j ai suivi dans l observation une méthode dif­ férente de la première. Le nouveau prisme dont je viens de parler était fixé à la lunette dun cercle répétiteur, de manière cependant que la moitié de l objectif fût découverte; je pouvais, par cette disposition, observer tantôt à travers l air, et tantôt à tra­ vers le prisme : la différence des deux hauteurs corrigée du mouvement de l étoile dans l intervalle des deux observa­ tions , me donnait ainsi la déviation sans quil fût nécessaire de connaître exactement la position absolue de l astre ob­ servé. Je pouvais dailleurs, en commençant ces observa­ tions, quelques minutes avant le passage des astres au mé­ ridien, les répéter un assez grand nombre de fois pour atténuer en même temps et les erreurs de pointé et celles de division ; telle est la méthode qui a servi à former le der­ nier tableau :
Au cercle répétiteur, 8 octobre 1810. 0 r //
a de r A igle, déviation............. = 2 2 .2 5 .9 Tache de la L u n e.......................= 2 2 .2 5 .9 a du Verseau............................. = 2 2 .2 5 .2 a Baleine...................................... = 2 2 . 2 5 .3 Aldébaran....................................= 2 2 .2 5 . o R igel.............................................= 2 2 .2 4 .5 9 a dO rion................................ ....= 2 2 .2 5 .2 Sirius............................................= 2 2 .2 5 .8
Je vais maintenant passer aux conséquences qui découlent de tous ces nombres.
On voit dabord que les inégalités de déviations sont en
( »9» ) général fort petites et du même ordre que celles que pré­ sentent les observations faites sans prisme; on peut, par cette raison, les attribuer aux erreurs dobservations ; mais supposons-les réelles, pour un instant, et cherchons à quelles inégalités de vitesses elles correspondent.
Je prends pour cela la formule analytique qui exprime la déviation des rayons lum ineux, en fonction des angles des prismes et de leurs forces réfringentes ; je la différentie par rapport à la vitesse de la lumière qui entre dans l ex­ pression du rapport du sinus dincidence au sinus de réfrac­ tion, et j obtiens ainsi la variation de la déviation en fonc­ tion de celle de la vitesse. On trouve p arce calcul, dont je ne puis lire les détails , que - ÿ — de variation dans la v i­ tesse de la lum ière, devait produire, dans mon premier prisme, un changement de déviation égal à 6"; cette va­ riation sélève à près de i4 " dans le prisme achromatique quadruple que jai appliqué à la lunette du cercle répétiteur : telles seraient donc les inégalités de déviations que je devrais trouver, si les rayons émis par les diverses étoiles que j ai observées avaient des vitesses qui différassent entre elles de 77775. O r la vitesse de translation de la Terre est préci­ sément égale à ce nombre; on sait dailleurs que son mou­ vement est dirigé vers les étoiles qui passent au méridien à 6 heures du matin et vers celles qui passent à 6 heures du soir, de telle sorte cependant quelle sapproche des pre­ mières et quelle séloigne au contraire des autres. La dé­ viation, dans le premier cas, doit donc correspondre à la vitesse démission augmentée de sa ,-7773 partie, e t, dans le second, à cette même vitesse diminuée de 1-7757 ; en sorte que les rayons dune étoile qui passe au méridien à 6 heures du m atin, doivent être moins fortement déviés que ceux dune étoile qui passe à 6 heures du soir, dune quantité égale à celle quoccasionne 777^ de changement dans la vi­ tesse totale, cest-à-dire de 12" dans les observations faites au m ural, et de 28" dans celles du cercle répétiteur; les
( »9* ) déviations des étoiles qui passent à minuit devraient dail­ leurs être les moyennes de cesdeux-là.
Or, en examinant attentivement les tableaux précédents, on trouve que les rayons de toutes les étoiles sont sujets aux mêmes déviations, sans que les légères différences quon y remarque suivent aucune loi.
Ce résultat semble être, au premier aspect, en contra­ diction manifeste avec la théorie newtonienne de la réfrac­ tion, puisquune inégalité réelle dans la vitesse des rayons noccasionne cependant aucune inégalité dans les dévia­ tions quils éprouvent. Il semble même quon ne peut en rendre raison quen supposant que les corps lumineux émet­ tent des rayons avec toutes sortes de vitesses, pourvu quon admette également que ces rayons ne sont visibles que lorsque leurs vitesses sont comprises entre des limites déter­ minées : dans cette hypothèse, en effet, la visibilité des rayons dépendra de leurs vitesses relatives, e t, comme ces mêmes vitesses déterminent la quantité de la réfraction, les rayons visibles seront toujours également réfractés.
Quoique les expériences précédentes soient suffisantes pour motiver la supposition que je viens de faire, puisque sans elle on ne pourrait les expliquer, il ne sera peut-être pas inutile de montrer que plusieurs autres phénomènes semblent la rendre également nécessaire.
Jobserverai dabord que dans, lévaluation des différences auxquelles doivent donner lieu les inégalités de vitesse, je n ai tenu compte que du mouvement de translation de la T erre, et que celui de notre système doit, en se combinant avec ce premier, être la source de nouvelles inégalités. Quelques étoiles doivent dailleurs se mouvoir dans lespace avec des vitesses très-considérables, puisque, malgré la pe­ titesse de leurs parallaxes, elles sont annuellement assujet­ ties à des déplacements très-sensibles ; la vitesse des rayons quelles nous envoient doit donc être la résultante de leur vitesse primitive démission combinée avec celle de létoile
( >93 )
elle-m êm e, et varier, par conséquent, avec la grandeur et la direction du mouvement des astres; mais lune des plus puissantes causes de changements dans la vitesse de la lu­ mière, paraît devoir être cependant l inégale grandeur des diamètres des étoiles. k; On trouve en effet, par le calcul, quune étoile de même densité que le S o le il, et dont le diamètre serait un petit nombre de centaines de fois plus considérable que celui de cet astre, anéantirait totalement par son attraction la vitesse de ses rayons, qui narriveraient par conséquent pas jusquà nous; une étoile vingt fois plus grande que le S oleil, sans détruire complètement la vitesse des rayons quelle aurait émis, laffaiblirait assez sensiblement pour quon dût trou­ ver une assez grande différence entre leur réfraction *et celle des rayons solaires; il suffirait même de supposer que le diamètre dun astre fût une fo is et demie plus grand que celui du Soleil, pour que la vitesse de sa lumière, à la dis­ tance qui nous en sépare, fût diminuée de sa -nrir-0partie, et donnât, par conséquent, naissance à des inégalités de déviation qui, dans le second de mes prismes, sélèveraient à i 5". Or il paraît peu naturel de supposer que Sirius, la Lyre, Arcturus et quelques autres étoiles qui brillent dun si v if éclat, malgré leur prodigieuse distance , ne sont pas égales au Soleil. Quoi quil en soit, on voit quà moins dadmettre, comme je l ai fait, que dans linfinité des rayons de toutes les vitesses qui émanent dun corps lumi­ neux, il n y a que ceux dune vitesse déterminée qui soient visibles, on ne pourrait expliquer mes expériences quen diminuant outre mesure la densité des étoiles ou leurs dia­ mètres; on arriverait, par exemple, à ce résultat singulier, que dans le nombre infini détoiles dont la voûte céleste est parsemée, il n y en a pas une seule de même densité que la T erre , et dont le volume égale en même temps celui du Soleil.
11 ne sera peut-être pas inutile de noter que les observa-
Ann de C.hinu et de Phrs., 3e série, t . X X X Y Il. (Février i853.) l 3
( *94 ) tions dont je yiens de rendre compte et la supposition qui les explique, se lient dune manière très-remarquable aux expériences de Herschel, Wollaston et Ritter. Le premier a trou vé, comme on s a it, quil y a en dehors du spectre prismatique et du côté du rouge, des rayons invisibles, mais qui possèdent à un plus haut degré que les rayons lumineux la propriété déchauffer; les deux autres physiciens ont reconnu, à peu près dans le même temps , que du côté du violet il y a des rayons invisibles et sans chaleur, mais dont Faction chimique sur le mùriate dargent et sur plusieurs autres substances est très-sensible. Ces derniers rayons ne forment-ils pas la classe de ceux auxquels il ne manque quune petite augmentation de vitesse pour devenir visibles, et les rayons calorifiques ne seraient-ils pas ceux quune trop grande vitesse a déjà privés de la propriété déclairer? Cette supposition , quelque probable quelle puisse dabord paraître, n est pas rigoureusement établie par mes expé­ riences, dont il est seulement permis de conclure que les rayons invisibles par excès et par défaut de vitesse,occu­ pent respectivement sur le spectre la même place que les rayons calorifiques et chimiques. 11 est dailleurs très-remar­ quable quon eût pu ainsi, et par des observations pure­ ment astronomiques , arriver à la connaissance des rayons invisibles et extérieurs au spectre, dont les célèbres physi­ ciens que nous avons cités n ont reconnu l existence qu'à l aide dexpériences délicates faites à l àide de thermo­ mètres très-sensibles et de substances dont la couleur est altérée par l action de la lumière.
Je nai point comparé , dans ce qui précède, mes expé­ riences au système des ondulations, parce que l explication quon donne de la réfraction repose, dans ce système, sur une simple hypothèse quil est très-difficile de soumettre au calcul, et quil métait, par suite, impossible de déterminer dune manière précise si la vitesse du corps réfringent doit avoir quelque influence sur la réfraction, et, dans ce cas , quels changements elle doit y apporter.
( *95 ) Je me suis uniquement attaché à montrer quen suppo-: sant que les rayons lumineux ne sont visibles que lorsque leurs vitesses sont comprises entre des limites déterminées, mes expériences peuvent se concilier parfaitement avec la théorie newtonienne. Mais si les limites qui déterminent la visibilité des rayons, sont, comme il est probable, les mêmes pour divers individus, l inégale densité des humeurs vitrées doit faire apercevoir cU# rayons inégalement rapi­ des; il résulterait de là que deux personnes regardant une même étoile, dans le même prisme et dans des circon­ stances analogues, pourraient la voir inégalement déviée. Le résultat de cette expérience, quel quil puisse être, pa­ rait devoir fournir quelques données sur le genre de sensa­ tion qui nous fait apercevoir les objets. Il ma semblé que le seul moyen de rendre ces essais bien décisifs était dy employer des prismes croisés, car les observations peuvent se faire alors avec beaucoup de précision, quelle que soit la grandeur de l angle réfringent. Jattendrai donc, pour com­ muniquer à la Classe les expériences que j ai faites sous ce rapport, que le temps mait permis dajouter les résultats de cette méthode à ceux que j ai déjà obtenus à l aide des pris­ mes achromatiques ; je me contenterai de remarquer, pour le moment, que je puis tirer de ce qui précède plusieurs conséquences astronomiques assez importantes. On voit : i° . Que les aberrations de tous les corps céles­ tes, soit quils nous envoient une lumière propre ou une lumière réfléchie, doivent se calculer avec la même con­ stante, sans quil y ait, à cet égard, la plus légère différence, ainsi que je l avais déduit de mes premières expériences; 2°. Que les phénomènes quon a expliqués par une iné­ galité dans la vitesse de la lum ière, tels que l apparence des étoiles sur le disque de la Lune quelques secondes avant l instant de l immersion, les déplacements dans les petites etoiles qui sont très-voisines des grandes , etc., ne peuvent dépendre de cette cause ;
i3 .
( >96 ) 3°. .Que Jhypotlièse à l aide de laquelle Piazzi a cherché à expliquer les différences quon trouve entre l'obliquité de l écliptique déduite des observations faites aux deux sol­ stices, est totalement contraire aux expériences, puisquelle revient à supposer que la lumière solaire ne se réfracte pas comme celle des étoiles ; 4°. E n fin , que le pouvoir réfringent de lair que nous avons déduit, M. Biot et m oi, de l observation dun objet terrestre, doit être absolument égal à celui quon aurait trouvé s i, dans nos expériences, il avait été possible de viser à une étoile. Il était dautant plus important de faire dispa­ raître le doute quon aurait pu élever à cet égard, que ce pouvoir réfringent est, comme 011 sait, lélément principal de la Table des réfractions.
ACIDE CAMPHOMÉTIIYLIQUE ;
P a r M. A. LOIR.
Jai suivi , pour obtenir l acide campliométhylique, dont lexistence nétait pas encore connue, le procédé indiqué par M. Malaguti pour préparer lacide camphovinique, en substituant seulement lalcool méthylique h l alcool du vin.
Cet acide se présente, tantôt sous la forme daiguilles longues de plusieurs centimètres rayonnant autour dun centre, tantôt sous celle de petites lames hexagonales ou quadrilatères. Mis en dissolution dans léther, il donne, par une évaporation très-lente, des cristaux isolés assez gros, très-nets, dont la forme est un prisme droit à base rhombe; les faces latérales formaut l angle aigu sont modifiées tangentiellem ent, chaque arête des sommets est modifiée par une facette. Les lames quadrilatères qui se déposent par une évaporation rapide de la solution éthérée, en sont une mo­ dification liémiédrique. A chaque extrém ité, deux des fa-